Durrenmatt : combattre le Mal

« Nous devrions tous être des Don Quichotte, si nous avions seulement un peu de cœur au ventre et un tout petit peu de cervelle sous le crâne. Mais pas pour nous lancer contre des moulins à vent comme ce vieux spectre de chevalier avec son armure de tôle ; non, mon ami : nous avons aujourd’hui à combattre de véritables colosses dans le monde. Les uns sont des monstres de cruauté et de malice, les autres d’énormes sauriens qui n’ont jamais eu plus de cervelle que les moineaux ; mais tous sont des brutes féroces, et des brutes qui ne vivent pas dans les livres de contes ou dans les fantaisies de l’imagination, mais dans le monde réel où nous sommes. Et notre tâche, je le répète, est de combattre l’inhumain, sous quelque forme qu’il se présente et dans n’importe quel cas. Mais pas n’importe comment, tout est là. »

Friedrich Dürrenmatt, le Soupçon, Albin-Michel, p. 242, 1961.

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