Roustang : l’inhumain, l’infra-humain et le pré-humain

« Mais cette régression vers le vol, le viol et le meurtre, où les intérêts humains se présentent sous une forme déshumanisée avant d’être aménagés et reconduits à l’humanité, n’est possible que dans les cas les plus favorables. Pour les psychotiques, ou ceux que j’ai nommés ailleurs des frontaliers (borderline), la situation est différente. Ils n’ont en quelque sorte jamais été admis à des relations humaines. De l’humain, c’est l’inhumain qu’ils ont connu, celui de l’absorption et du rejet. Pour se protéger de cet inhumain qui les a formés, ils ont dû se réfugier dans l’infrahumain ou dans le pas encore humain (condition de l’humain pourtant) des animaux, des végétaux et des minéraux. Corps de pierre qui ne peuvent ni souffrir ni jouir, parce que toute souffrance est interdite à ce qui a été réduit à l’état d’objet, parce que la jouissance n’est pas l’affaire d’un individu auquel on a retiré toute intériorité. Plante incapable de locomotion, parce qu’il leur est impossible de se détacher du lieu où ils sont placés, parce qu’ils doivent rester là fixés sans pouvoir connaître l’absence qui serait pour eux mortelle.

Il leur faudra donc en analyse pouvoir repasser par ce non-humain qui les fonde. »

François Roustang, Comment faire rire un paranoïaque ? Odile Jacob, 1996.

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